vendredi 17 janvier 2014

L’incompressible déficit budgétaire, suite

Le gouvernement vient de reconnaître que le déficit du budget de l’Etat pour 2013 serait de 74,9 milliards d’euros. Cela ne fait que confirmer ce que nous avons dit l’année dernière et en 2012 : depuis la crise de 2008, la France fait face à un déficit incompressible de l’ordre de 80 milliards d’euros (contre 40 précédemment, soit un doublement). Ce gouvernement, et le précédent, nous vendent l’histoire de la "trajectoire de retour à l’équilibre" d’ici 4 ou 5 années, et ils mentent. Seules des réformes structurelles permettraient d’y parvenir, car désormais nous sommes passés du mauvais côté de la courbe de Laffer : toute augmentation des taux d’imposition produit un recul des recettes fiscales. L'impôt sur les sociétés (-2,5 milliards) et l'impôt sur le revenu (-1,8 milliard) reculent en effet, la consommation se maintient (les recettes de TVA augmentent de 0,6 milliard), mais en fait grâce aux transferts sociaux financés en partie par la dette… Une remarque en passant : le recul de l’impôt sur le revenu et de celui sur les bénéfices des entreprises témoigne d’une récession du secteur privé, mais comme le fameux "PIB" inclut aussi les dépenses publiques (financées par la dette), cela permet d’afficher une stagnation ou une légère croissance de ce PIB, mais cela est artificiel on le comprend bien.

Bercy indique que ce déficit de 74,9 milliards traduit une dégradation de 2,7 milliards par rapport au dernier collectif budgétaire. Mais c’est une façon de noyer le poisson : dans la première version du budget 2013, le déficit prévu était de 62,3 milliards (cf Wikipedia ou ce document de Bercy page 3), soit un écart de 12,6 milliards ! A ce niveau, ce n’est plus du dérapage, c’est de l’aveuglement.

Terminons avec un chiffre que nous aimons bien citer ici, car ramener le déficit au PIB est une façon de le minorer. Faisons un autre calcul : les dépenses sont de 368,1 milliards, les recettes de 293,2 (recettes fiscales 284, autres recettes 9,2), soit un déficit de 74,9 (368,1-293,2). Ce qui importe – comme pour tout budget - c’est de ramener le déficit aux recettes, soit 74,9/293.2 = 25,5%. 3 euros de recettes, 4 de dépensés, 1 de déficit, soit clairement un budget à la dérive. Rendez vous l’année prochaine avec un déficit effectif de 80 milliards, on prend les paris !


Autrement je passais hier sur France Inter dans "Le Téléphone sonne" pour parler du bitcoin (podcast)

Philippe Herlin