samedi 30 juillet 2011

Compte à rebours

Toujours pas d’accord sur le relèvement de la dette publique des Etats-Unis… Le 2 août les intérêts et les remboursements ne seront plus versés sur la dette américaine. On sous-estime l’impact de cette crise à mon avis, si le problème n’est pas réglé mardi prochain. On parle de risque de perte du AAA, de baisse des bourses (voir ce scénario noir). Il faut bien comprendre que les 14.000 milliards de dollars de dette des USA représentent, par définition, 14.000 milliards de créances pour ceux qui les détiennent (banques, assurances, fonds de pension, banques centrales, fonds de placement) et servent de collatéral à quantité de produits. Si les USA font défaut sur leur dette, c'est-à-dire ne versent plus d’intérêts et ne remboursent plus les emprunts lorsqu’ils arrivent à échéance, l’obligation que vous détenez ne vaut plus rien, puisqu’elle ne génère plus de revenus. Zéro. Ca veut dire que 14.000 milliards de créances disparaissent d’un coup ! Autant dire que le système financier mondial s’écroule. Lehman Brothers avait un bilan de 600 milliards de dollars avant sa chute. Soyons clairs, dans les jours qui suivent (ou une à deux semaines), nous n’aurions plus accès à nos comptes bancaires, tout serait bloqué. Mais je continue de penser que ça n’arrivera pas, justement vu l’ampleur de la crise ; une solution pourrait même intervenir quelques jours après le 2 août, ça irait encore...

Autrement, en vrac : croissance en baisse aux USA, et le taux de croissance du premier semestre revu en baisse, à 0,4 % au lieu de 1,9 ! Preuve qu’il n’y a jamais eu de « reprise » (comme nous l’avions dit) et que les indices (inflation, croissance, etc) sont clairement manipulés. Il y a (aussi) quelque chose de pourri au royaume du Danemark (hors zone euro, mais quand même) : ses banques. Anecdotique mais révélateur d’un amateurisme effarant, les cotations du CAC40 suspendues plusieurs heures vendredi dernier… Bah tiens voilà la solution, bloquer tous les indices ! Plus rien ne bouge, on part en vacances et on voit à la rentrée.

On lira les commentaires du précédent billet, très intéressants (les autres aussi !), merci à vous tous.

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Philippe Herlin

mercredi 27 juillet 2011

Lente dégradation générale

Le plan d’aide à la Grèce (voir notre billet précédent) n’aura pas fait illusion longtemps, les marchés boursiers ne cessent de baisser, spécialement les « financières » (banques et assurances), et Standard & Poor's craint une nouvelle crise grecque. Dans le même temps la dégradation de la zone euro continue, Chypre vient de perdre sa principale centrale électrique (suite à l’explosion d’une cargaison d’armes iraniennes stockée à côté, quelle bande de pieds nickelés), résultat Moody’s dégrade sa dette. D’autre part l’Italie et l’Espagne empruntent à des taux de plus en plus élevés.

Aux Etats-Unis, toujours pas d’accord sur le relèvement du plafond de la dette… Au passage une info importante dont personne ne parle (sauf La Chronique Agora), le premier audit de la Fed vient d’être publié, grâce à l’insistance de Ron Paul, et l’on apprend que la Banque centrale américaine a dépensé 16.115 milliards de dollars (plus que la dette du pays !) depuis la crise de 2008 en prêts d’urgence pour soutenir le secteur financier (dont plusieurs banques françaises), et on ne sait pas quelle proportion a été remboursée…

Une autre info concernant la France dont personne ne parle, anecdotique mais révélatrice : le prix moyen du panier de fournitures scolaires va augmenter de 18 % ! Et après l’Insee va nous expliquer que l’inflation est de 2 % par an…

Philippe Herlin

vendredi 22 juillet 2011

L’UE se sauve temporairement

« Le mois de juillet sera chaud » annoncions-nous le 10 juin dernier, tout en considérant que l’explosion de l’euro n’aurait pas lieu et qu’une couche d’endettement public supplémentaire serait rajoutée. Nous y voilà ! Le pessimisme des derniers jours (Angela Merkel annonçant mardi ne rien attendre du sommet d’hier) n’était pas de mise, l’UE met 158 milliards d’euros sur la table, les marchés respirent.

Le plan (lire ici et ici) mis en place comprend plusieurs volets :
1) le FESF prêtera à la Grèce (ainsi qu’à l’Irlande et au Portugal) à des taux moindres (3,5 %) et sur des durées plus longues (15 ans)
2) les créanciers privés (banques, assurances) détenteurs d’emprunts grecs pourront choisir différentes modalités : a) les revendre au FESF avec une décote de 40 % ; b) les échanger contre de nouveaux prêts ; c) réinvestir dans de nouveaux prêts lorsqu’ils arriveront à échéance (rollover) ; tout cela représentant un coût à la charge de ces créanciers.
3) le FESF voit son rôle s’accroître, il pourra a) racheter de la dette grecque (point 2a) ; b) racheter de la dette d’Etat sur le marché secondaire, avec l’accord unanime des pays membres ; c) consentir des prêts à des Etats membres en difficulté, ou pour renflouer leur système bancaire.
Le plan est bien négocié, il n'y a pas de défaut de paiement, et donc de déclenchement des CDS.

Il y a des pas dans la bonne direction : une mini-restructuration de la dette grecque, néanmoins insuffisante pour qu’elle redevienne solvable (26 milliards d’effacés sur 350), l’engagement des Etats à revenir sous les 3 % de déficit budgétaire dès 2013 (on est à 7 en France cette année, ça va être chaud !), le fait que les créanciers privés mettent la main à la poche.

Mais on assiste surtout à un renforcement de l’endettement public au niveau européen, favorisé par l’extension des missions du FESF qui va devenir une sorte de « FMI européen ». En fait le FESF va prendre le relais de la BCE qui a déjà rempli son bilan d’actifs douteux (emprunts grecs, irlandais et portugais) et met ainsi en péril sa situation financière. Il ne manquera plus au FESF de pouvoir émettre des obligations pour encore accélérer la monétisation des dettes publiques européennes. Une fuite en avant.

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

mercredi 20 juillet 2011

Euro : en route vers la monétisation

Le sommet européen de jeudi ne donnera rien, pas besoin de lire dans une boule de cristal, c’est Angela Merkel en personne qui l’annonce ! Les motivations sont désormais trop divergentes entre l’Allemagne qui ne veut plus payer, la France qui veut protéger ses banques et donc renflouer la Grèce, la BCE qui est tout simplement menacée de faillite en cas de restructuration (voir cette note)… Et chacun joue sa propre carte : « les banques françaises ont maintenu leur exposition au risque grec, comme elles s'y étaient engagées, alors que leurs concurrentes allemandes l'ont réduite » peut-on lire dans cet article. Juste une question : comment peut-on être aussi stupide ? Dans le même genre, l’Agence France Trésor a cru intelligent d’émettre des obligations indexées sur l’inflation, les OATi, mais comme les prix repartent à la hausse, cela se traduit par un surcoût ; en cas d’hyperinflation ces seuls produits peuvent nous ruiner, alors que nous empruntions jusqu’alors exclusivement à taux fixe, ce qui constitue une vraie sécurité ! Bref, cette incapacité de l’Europe à agir s’avère inquiétante, le FMI estime une issue « imprévisible si la crise de la dette en Europe empire »… Que se passerait-il si la crise de la zone euro s’aggravait ? Eh bien sachez que la monétisation est en route, avec la bénédiction de la BCE elle-même, qui explique que la Banque nationale de Grèce pourrait refinancer les banques grecques ! L’Etat grec pourrait ainsi émettre des emprunts, qui seraient achetés par les banques grecques, puis par la Banque nationale de Grèce, et en avant la création monétaire ! On apprend au passage que l’Irlande le fait déjà. Une folie furieuse car c’est l’Eurosystème (BCE + les banques nationales) qui garantit l’euro (voir cette note). La BCE a déjà racheté de grandes quantités d’emprunts d’Etat, si les banques nationales s’y mettent... Et qui dit monétisation dit inflation et perte de valeur de l’euro. Un conseil, achetez de l’or.

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

lundi 18 juillet 2011

Une semaine cruciale

La semaine qui s’ouvre s’avère cruciale, la crise des dettes publiques en Europe et aux Etats-Unis atteignent leur paroxysme et il deviendrait extrêmement dangereux qu’une solution ne soit pas trouvée au plus tard vendredi. Aux Etats-Unis la Maison Blanche a fixé à vendredi la date butoir pour trouver un compromis pour éviter le défaut de paiement. Le problème est surtout politique (opposition entre le congrès républicain et le président démocrate) et la réponse est concrètement simple à apporter (relever le plafond d’endettement). Par contre en Europe les intérêts des uns et des autres (Allemagne, France, Pays du Sud, BCE, banques privées) entrent en conflit et une solution semble bien difficile à trouver. Le sommet de jeudi sera crucial. La semaine commence mal pour l’Europe, les stress-tests bancaires sont en fait bidons et personne n’y croit, et pour cause, ils ne tiennent pas compte des dettes souveraines, le risque pourtant le plus évident, mais seulement de scénarios macroéconomiques ! (cf l’article de George Ugeux, très en colère). Il vaudrait mieux que la semaine se termine sur une note positive, sinon toute la zone euro sera en danger. Quoi qu’il en soit, des réponses convaincantes apportées à cette crise ne feraient que gagner du temps sans rien résoudre sur le fond, mais au moins pourrait-on passer l’été tranquille…

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

jeudi 14 juillet 2011

Une solution ?

On pourrait reprocher à ce blog de se limiter à décrire la progression d’une crise sans proposer de solution pour s’en sortir. Alors voilà, je me lance, avec ce « plan B » susceptible, à mon avis, de nous sortir de la crise actuelle de l’euro. Il est peut être déjà trop tard, alors que la Grèce et l’Irlande ont encore été dégradées et que l’Europe semble paralysée. Voici en tout cas une solution, vos avis sont les bienvenus : Ce n'est pas l'euro qu'il faut sauver à tout prix, mais l'économie européenne, dans Atlantico.

Autrement j’ai donné cette interview à UnMondeLibre et je passe demain vendredi à midi dans l’émission « Idées politiques » (sur Radio courtoisie, 95.6).

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

lundi 11 juillet 2011

Accélération

La crise de la dette publique en zone euro s’accélère : les taux battent des records pour la Grèce, l’Irlande et le Portugal (les chiffres ici). Après des inquiétudes concernant l’Espagne, on parle désormais de « schéma de panique » pour l’Italie. Une réunion d’urgence a lieu aujourd’hui à Bruxelles entre le Conseil, la Commission et la BCE. Il n’y a toujours rien en vue concernant le plan d’aide à la Grèce (le récent déblocage de 3,2 milliards d’euros est fait au nom du plan validé l’année dernière, le futur plan est toujours dans les cartons). La situation semble devenir de plus en plus incontrôlable. On peut avoir un krach du type Lehman Brothers dans les jours qui viennent. Aux Etats-Unis Obama pose un ultimatum de 10 jours pour trouver un accord avec le Congrès pour relever le plafond d’endettement. Le temps s’accélère…

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

jeudi 7 juillet 2011

Contagion

Le risque de contagion revient hanter les marchés titre Les Echos. Par contagion on pense à une propagation de la crise de la dette à d’autres pays, et c’est effectivement un canal de transmission possible. Mais il faut également en envisager un autre, qui irait directement de banques locales à la Banque centrale européenne (BCE), puis à toute la zone euro. Le Think thank Open Europe vient de publier une étude qui montre que la BCE est exposée à hauteur de 444 milliards d’euros à la dette souveraine de pays au bord de la faillite (Grèce, Irlande, Portugal) ou en difficulté (Espagne, Italie). Pour la Grèce, l’Irlande et le Portugal, ce montant s’élève à 338,7 milliards d’euros (cf tableau 2 page 6 de l’étude).

Comment en est on arrivé là ? Les banques grecques, irlandaises et portugaises ne peuvent pas se refinancer sur le marché interbancaire (aucune banque européenne ne veut leur prêter de l’argent vu que leur Etat est au bord de la banqueroute), donc elles se tournent vers la BCE, qui leur donne des liquidités en échange d’actifs financiers (le « collatéral »), essentiellement des bons du Trésor de leur pays, ou d’autres actifs plus ou moins pourris. La BCE accepte sinon c’est la faillite avec un krach à la Lehman à la clé. Et ainsi la BCE se retrouve avec un bilan rempli de bons du Trésor grec, irlandais et portugais, c'est-à-dire complètement toxique ! D’autant qu’elle possède peu de fonds propres, elle se retrouve ainsi avec un ratio digne d’un hedge fund hyperspéculatif : 1 euro de cash pour 23,4 euros d’engagement (cf tableau 1 page 6 de l’étude, la Banque nationale de Suisse a un ratio de 1 pour 6,25) !!!

Un scénario possible serait donc une crise de liquidité (une faillite) d’une banque grecque (ou irlandaise). C’est d’autant plus possible qu’elles sont notées CCC (l’une des pires notes avant le défaut) et que les déposants grecs retirent leur argent pour le mettre à l’étranger (un comportement rationnel !). Cela s’étend par ricochet aux autres banques grecques, et la BCE se retrouve de facto INSOLVABLE (euh, une faillite de la banque centrale, c’est à quelle page du manuel d’économie ça ?). Bien sûr immédiatement les Etats actionnaires (Allemagne, France, etc.) renfloueraient la BCE pour qu’elle continue à fonctionner, mais le choc de défiance sur l’euro serait énorme.

Le pire c’est que le Traité de Lisbonne interdit le renflouement d’un pays et à la BCE d’acquérir des emprunts d’Etat, ce qui pourtant a été fait, sur la pression des dirigeants politiques. Résultat, la zone euro se trouve désormais dans une situation inextricable et très dangereuse.


Addendum : vous pourrez voir que mon article sur l’assurance-vie sur Atlantico a fait l’objet d’un correctif à la demande d’Axa, dans le 2e paragraphe (qui n’est pas exposé à la Grèce à hauteur de 1,9 milliard d’euros mais de 1,1). Bien. Mais le fond de l’article n’est pas remis en cause, ce qui signifie qu’il est validé par Axa, à savoir que les souscripteurs d’assurance-vie vont se manger la plus grande partie des pertes en cas de défaut de la Grèce. Merci à Axa pour cette confirmation. Maintenant chacun est prévenu.

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

mardi 5 juillet 2011

Bulle immobilière et inflation en Chine

Tiens, parlons de la Chine. Cet article d’Atlantico confirme une information que l’on avait déjà lue ailleurs : il y a 65 millions d’appartements vides en Chine. De quoi loger 200 millions de Chinois. Ce n’est pas une estimation, c’est le nombre d’appartements construits n’affichant pas de consommation électrique. Contrairement aux Etats-Unis ou à l’Espagne, il ne s’agit pas de ménages surendettés qui ne peuvent plus payer, et donc habiter, leur logement. Tous ces quartiers, parfois des villes entières, inhabités ont été financés par les collectivités locales qui anticipaient, un peu trop, la croissance future, ainsi que pour soutenir l’activité suite à la crise de 2008. Conséquence, la dette des collectivités locales chinoises commence à inquiéter et, selon certains experts, la dette publique totale (en rajoutant donc l’Etat central aux collectivités) dépasserait 80 % du PIB ! Autant que la France. Cette masse de crédit déversée dans l’économie sans contrepartie réelle commence à générer de l’inflation… Tout est opaque et sous contrôle dans l’Empire du milieu, mais gardons quand même un esprit critique, et ne nous limitons pas à cet idyllique taux de croissance du PIB de 10 % l’an.

Autrement, mon interview dans eFinancialCareers.

Et pour vos vacances, emmenez quelques MP3 de Classical Music Mobile, mon autre site ! Carmen de Bizet, la Pathétique de Tchaikovsky, les dernières symphonies de Mozart, à 1 euro seulement.

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr

vendredi 1 juillet 2011

La Fed va continuer son Quantitative easing

Intéressant article de CNN : la Fed va continuer son Quantitative easing après le 30 juin pour environ 300 milliards de dollars, en utilisant les remboursements d’emprunts arrivant à échéance. Il ne s’agira pas de création monétaire (contrairement aux QE 1 & 2) puisque l’argent provient du Trésor, qui en l’occurrence rembourse les emprunts arrivant à échéance, et la Fed en possède d’énormes quantités. CNN parle de « QE 2.5 », c’est de la monétisation de dette sans création monétaire si l’on peut dire. C’est malin, mais ça reste de la cavalerie.

Pendant ce temps, Washington n’arrive toujours pas à trouver un accord pour relever le plafond de la dette et Timothy Geithner, le secrétaire d'État au Trésor, pourrait démissionner. Pendant ce temps, la Grèce devrait arriver à toucher un deuxième plan d’aide de 120 milliards d’euros, tandis que l’inquiétude ne cesse de croître en Europe comme en témoignent l’évolution des CDS. Pendant ce temps la dette de la France atteint un nouveau record à 1646 milliards d’euros. Pour l’instant les Etats ne font que ralentir le compte à rebours.

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr