mardi 30 août 2011

Faut-il s’inquiéter pour les banques ?

Christine Lagarde, la nouvelle directrice du FMI, déclare vendredi que les banques européennes ont un « besoin urgent de recapitalisation ». « Mais non pas du tout » répondent en cœur plusieurs responsables de la Commission européenne. Qui a raison ? Notre ancienne ministre de l’économie, qui semble avoir trouvé une plus grande liberté de parole à la tête du FMI. Ses craintes sont en effet confirmées par l’Autorité bancaire européenne (EBA), l'Autorité française des marchés financiers (AMF) et le Conseil des standards comptables internationaux (IASB), rien de moins. Ce sont notamment BNP Paribas et CNP Assurances qui sont critiquées pour avoir passé des provisions insuffisantes sur les emprunts grecs qu’ils détiennent, notamment en usant de subterfuges : « BNP Paribas, qui a passé une charge de 534 millions d'euros sur la Grèce (soit 21 % de décote) dans ses comptes du deuxième trimestre, a expliqué avoir valorisé ses titres de dette grecque en appliquant un modèle interne de valorisation plutôt qu'en utilisant leurs prix sur le marché, jugés "non représentatifs" par la banque. Les établissements financiers ayant quant à eux utilisé les prix du marché, comme Royal Bank of Scotland, ont opté pour des décotes beaucoup plus lourdes, de l'ordre de 50%. » (Les Echos). Bah voyons, des « modèles internes » plutôt que le marché, c’est plus pratique, même si ça revient à jouer avec le feu. Déjà, sur 2009-2010, l’amélioration des résultats des banques provenait essentiellement d’une baisse des provisions pour risques (voir ce billet), elles continuent, et le risque souverain devient de plus en plus réel. Alors faut-il s’inquiéter pour les banques ? Oui bien sûr.



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Philippe Herlin

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vendredi 26 août 2011

Racket fiscal

Le plan présenté hier par le Premier ministre pour réduire le déficit n’est bien sûr pas à la hauteur des enjeux (seulement 11 milliards), et surtout il ne comprend que des hausses d’impôts et de taxes, mais aucune vraie réduction des dépenses publiques. Il y a même des mesures ridicules (hausse des taxes sur les sodas sucrés ou les parcs à thème), bref, je ne comptais même pas en parler. Cependant une disposition particulièrement scandaleuse mérite d’être signalée. Il ne s’agit pas de la mesure elle-même (la suppression de l’abattement de 10% par an à partir de la cinquième année de détention pour les plus-values réalisées sur sa maison secondaire). Non, il s’agit de sa date d’entrée en vigueur : le 25 août 2011, soit le jour même de son annonce ! Les gens sont coincés, ils avaient fait des prévisions, les sommes en jeu sont conséquentes, et les règles changent du jour au lendemain (en fait c’est « après le 24 août » donc ceux qui ont signé le 25 l’ont fait sans savoir que la loi avait changé puisque Fillon est intervenu à 18h). Cela me semble extrêmement grave, comment une démocratie – je pèse mes mots – peut-elle se permettre une telle arnaque ? A quoi sert l’Assemblée nationale ? A quoi sert le Conseil des ministres, qui avait lieu la veille mais n’a pas évoqué cette mesure ? Qui fait la loi en France ? Cette loi ou ce décret a-t-il été seulement été publié ? Fait en cachette ? Ou alors la loi sera-t-elle rétroactive, mais c’est contraire à la Constitution. Le Conseil constitutionnel trouve-t-il normal que l’on puisse annoncer et mettre en œuvre une loi le jour même, comme s’il s’agissait d’une situation d’exception ? Ceci n’est rien d’autre que du racket fiscal.

Addendum du 6/9/2011 : le gouvernement repousse la date de mise en oeuvre au 1er février 2012... au risque de provoquer un krach immobilier ! Quelle politique de gribouille.

Autrement j’ai créé cette page Facebook pour vous permettre de suivre les publications de ce blog.

Philippe Herlin
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mardi 23 août 2011

Banques : défiance, manipulation, détournement…

La bourse remonte, la crise est finie ? Non bien sûr, la défiance des banques entre elles demeure et le marché interbancaire se grippe, même si l’on reste encore loin des niveaux atteints lors de la crise de 2008. Pour limiter la glissade de son cours, la Société Générale fait appel à la banque Rothschild pour soutenir son action. Cette pratique est acceptée par la « Charte d'éthique » des instances de régulation précise l’article, nous voilà rassurés. La SocGen va donc dilapider 170 millions d’euros pour « contrôler » son cours, hum, si elle les mettait dans ses fonds propres, ce serait peut être plus utile…



Autrement en Grèce, quand ce n’est plus l’Etat qui manque d’argent, ce sont les banques : les quatre grandes banques grecques volent au secours d’une petite menacée de faillite (la Proton Bank, lire aussi cet article), par ailleurs soupçonnée – tenez-vous bien – de détournement de fonds ! On pensait que le gouvernement grec serrait les boulons, on a du se tromper. Ces quatre grandes banques étant elles-mêmes bientôt à cours de liquidité ! Quelle mascarade. Un scénario de faillite bancaire en Grèce que nous avions évoqué dans ce billet, et qui pourrait avoir de graves répercussions sur le système bancaire européen.



Autrement, suite à de nombreuses demandes, je vous propose un service personnalisé de conseil en placement.



Philippe Herlin

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vendredi 19 août 2011

Crise bancaire à l’horizon ?

Le CAC a perdu 20% en quinze jours, il s’agit bien d’un krach mais d’un nouveau type puisqu’étalé dans le temps au lieu d’être concentré sur une ou deux séances. Mais au fond ça change quoi ? Rien. Ce krach est du aux craintes de récession aux Etats-Unis et à des problèmes de liquidité des banques européennes. Ce second point est inquiétant parce qu’on ne dispose que de bribes d’information pour l’instant alors que, manifestement, certains opérateurs sur les marchés «savent des choses», il suffit de voir les cours des banques plonger. Selon le Wall Street Journal, la Fed s’inquiète de la liquidité des filiales américaines de banques européennes. Au même moment, pour confirmer cette information, on apprenait que la BCE a prêté à 7 jours 500 millions de dollars à une banque européenne, sans préciser laquelle. Soyons clairs : ce ne peut être qu’une grande banque (vu le montant) ayant une filiale aux USA (le prêt est en dollars) qui connaît donc de graves problèmes de refinancement (personne ne veut lui prêter cet argent, la banque se tourne alors vers la BCE) ; et une banque qui connaît de graves problèmes de refinancement est une banque au bord de la faillite. Et manifestement elle n’est pas la seule puisque le marché interbancaire se grippe, les banques rechignent de plus en plus à se prêter entre elles et préfèrent déposer leurs liquidités à la BCE (90,5 milliards d’euros à 24h hier), où pourtant elles rapportent moins. Autre signe inquiétant, les fonds monétaires américains se retirent des banques européennes, tandis qu’un gérant affirme que «La France a été identifiée comme étant le gros risque à venir en cas d’effet domino». Alors de quelle banque s’agit-il ? De la Société Générale, très attaquée sur les marchés ? Peut être, mais en fait tout le secteur bancaire en Europe recule, de grandes banques italiennes, allemandes, anglaises dévissent également en bourse. Mais on ne peut désormais plus exclure le scénario d’un « Lehman Brothers » bis, mais qui toucherait cette fois non pas une banque d’affaires mais une grande banque de dépôt.



Philippe Herlin

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jeudi 18 août 2011

Les Français plus mâtures que les politiques

Retour sur deux sondages parus pendant les vacances, et dont on ne mesure pas assez l’importance. Dans Le Parisien du 11 août, lorsqu’il faut réduire le déficit et la dette, les sondés privilégient à 85% la réduction des dépenses publique et à seulement 12% une augmentation des impôts. Dans Sud Ouest du 12 août, la question est posée de façon différente puisque l’on teste plusieurs mesures de diminution des dépenses de l’Etat (TVA des restaurateurs, défiscalisation des heures supplémentaires, etc.), puis une augmentation des impôts à laquelle 24% des sondés se rattachent. Ces résultats confirment l’enquête de la Fondation Jean Jaurès dont nous avions parlé en février où seulement 8% des sondés étaient favorables à une hausse des impôts pour diminuer les déficits. Dans leur immense majorité, les Français ont compris : pour sortir des déficits et de la dette, il faut diminuer les dépenses publiques plutôt qu’augmenter les taxes et les impôts, leur niveau déjà très élevé ne pouvant que décourager la création de richesses. Le problème c’est que, jusqu’à preuve du contraire, aucun candidat à la Présidence de la République ne portera ce projet. Ce sont tous – sous des formes et à des degrés divers – des étatistes, des idolâtres de « l’Etat », des défenseurs de la dépense publique, intellectuellement incapables de restreindre le rôle de l’Etat, pour quoi ? Pour faire confiance à la société et aux individus. On attend en France le candidat qui reprendra le slogan de Ronald Reagan en 1980 : « l’Etat n’est pas la solution, c’est le problème. »



Autrement en vrac, des tensions inquiétantes sur le marché interbancaire, cet intéressant article sur le Portugal, et le niveau des CDS sur la France (rajouté dans la rubrique des liens).



Philippe Herlin

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mercredi 17 août 2011

Deux avancées pour le sommet Merkel-Sarkozy

Deux bonnes nouvelles sont sorties de la réunion Merkel-Sarkozy d’hier : les Eurobonds ne sont toujours pas à l’ordre du jour (Berlin l’a emporté, tant mieux, tant ils seraient la porte ouverte à encore plus d’endettement), et les pays de la zone euro devront inscrire la « règle d’or » (interdiction du déficit budgétaire) dans leurs constitutions. Pour une fois, on prend le problème à la base : le déséquilibre des comptes publics. Bien sûr cette règle reste encore floue (aura-t-elle plus de poids que les critères de Maastricht qui ont été enfreint par presque tous les pays ?), mais incontestablement elle va dans la bonne direction. En faisant un peu de mauvais esprit, on pourrait la lire comme le souhait de voir la Grèce (et d’autres pays) quitter la monnaie unique tant son retour à l’équilibre budgétaire dans la cadre de l’euro paraît utopique… Cependant, la mise en place de cette règle et son effectivité sur les budgets prendront des années, elle ne suffira pas à répondre aux problèmes d’aujourd’hui. Deux autres mesures ont également été annoncées, une plus grande coordination budgétaire (cela reste vague, on attendra les précisions) et une taxe sur les transactions financières (la taxe Tobin), une idée inappropriée, nous y reviendrons. Même si la crise actuelle n’a rien perdu de sa menace, une fois n’est pas coutume, un sommet européen n’aura pas été inutile !



Autrement, mon interview pour toutsurmesfinances.com.



Philippe Herlin

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jeudi 11 août 2011

La France entre dans la spirale de la défiance

La bourse a encore lourdement chuté hier, spécialement les valeurs bancaires, au premier rang desquelles la Société Générale (jusqu’à - 21 % en séance, avant de terminer à – 14,74). Plusieurs rumeurs l’ont en effet affecté, notamment une expliquant qu’elle était « au bord du désastre »… Ces rumeurs ont été démenties et rien, pour l’instant, ne permet de les confirmer. Mais le plus grave, ce n’est pas que ces rumeurs existent (elles sont monnaie courante sur les marchés), c’est qu’elles soient prises autant au sérieux et conduisent à massacrer la banque en bourse. Si l’on rajoute à cela la très forte hausse des CDS (produit d’assurance contre le défaut) sur la dette française, les choses sont désormais claires : la France entre dans la spirale de la défiance. Les agences confirment le AAA de la France… sur la foi d’un programme de réduction du déficit budgétaire (3 % en 2013) largement illusoire comme nous l’avons déjà dit. Hier toujours, le Président Sarkozy à convoqué une réunion d’urgence à l’Elysée pour annoncer… que les ministres de l’économie et du budget feront des annonces le 24 août (tout ça pour ça, il faudrait veiller à ne pas gaspiller nos cartouches). Résumons : craintes sur les banques, valse des rumeurs, hausse des CDS, réunions politiques d’urgence, voici le scénario que nous avons déjà connu pour la Grèce, l’Irlande, l’Espagne, l’Italie.



Une dégradation de la France dans les mois qui viennent n’est donc plus à exclure. Notons qu’elle aurait un effet sur toute l’architecture des plans d’aide en Europe, puisque le FESF – le fonds de soutien sollicité pour les pays en difficulté – perdrait alors son AAA (il n’y aurait plus que l’Allemagne comme grand pays à l’avoir dans la zone euro) et tout le mécanisme de financement, et les plans mis en place, serait remis en cause.



Philippe Herlin

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samedi 6 août 2011

Les Etats-Unis perdent leur AAA

Voilà c’est fait, les Etats-Unis perdent leur AAA. Ils descendent d’un cran à AA+. Standard & Poor’s vient de l’annoncer (voir la note complète), gageons que Moody’s et Fitch, les deux autres agences, devraient suivre d’ici quelques semaines. Si la rumeur circulait hier, c’est très largement une surprise et il faut s’attendre à une sévère correction lundi sur les marchés. Au-delà, il s’agit d’une nouvelle historique et géopolitique de la première importance. Le prestige du dollar est incontestablement atteint, la « monnaie de référence » ne l’est plus tout à fait. « Le dollar c’est notre monnaie et votre problème » disait le secrétaire au Trésor en poste en 1971, au moment où la convertibilité du dollar en or fut suspendue par Nixon. Désormais cette formule se retourne contre les Américains. Eux qui pensaient indéfiniment financer leurs déficits budgétaires par la planche à billet sont rappelés à la réalité par l’agence de notation.

Les conséquences sont difficilement calculables. En interne, les taux des prêts immobiliers et de consommation vont augmenter, les notes des collectivités locales (Etats, comtés, villes, dont beaucoup sont en difficultés) vont être dégradées et, pour l’Etat fédéral, le paiement des intérêts de la dette va augmenter de 100 milliards de dollars (selon JP Morgan), le coût de la dette étant de 414 milliards en 2010. Et ce n’est qu’un aspect du problème. Il faut bien comprendre que les 14.500 milliards de dollars de dette des USA représentent 14.500 milliards de créances pour ceux qui les détiennent (banques, assurances, fonds de pension, fonds souverains, banques centrales, entreprises, vendeurs de matières premières) et ceux-ci vont devoir tenir compte du fait que cet actif a perdu en valeur, ce qui les amènera à « repositionner » leur portefeuille ; vu les masses en jeu ça va tanguer.

Et la France ? La raison avancée par l’agence de notation est que le programme voté au Congrès suite au bras de fer avec Obama est « insuffisant pour stabiliser la dette des Etats-Unis à moyen terme ». Il en va exactement de même en France, le retour à un déficit du 3 % du PIB en 2013 étant totalement illusoire (voir mon texte sur Atlantico qui reprend mon billet précédent). Ne nous croyons surtout pas à l’abri.

Cet événement sera peut être un « Lehman Brother » bis, ou pas, difficile à prévoir, mais il se rajoute à des signes négatifs sur la croissance américaine et à une fragilité persistante du système bancaire (aux Etats-Unis et en Europe). La récession n’est plus très loin.

Philippe Herlin
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mercredi 3 août 2011

La France bientôt dans le viseur

On parle de contagion de la crise de la dette européenne à l’Espagne et à l’Italie, et effectivement on peut déjà le constater par la hausse des taux de leurs emprunts. Mais très vite viendra le tour de la France, et ce pour une raison simple : ses promesses de retour à l’équilibre des comptes publics sont illusoires. Son déficit budgétaire peine à diminuer et la prévision d’un déficit à 3% du PIB en 2013 s’avère bien trop optimiste car construite sur une hypothèse de croissance de 2 % cette année et 2,25 en 2012 ! C’est plutôt un ralentissement qu’il faut prévoir, comme partout ailleurs en Europe et aux Etats-Unis. La « règle d’or » de limitation des déficits, malgré sa complexité et son carambolage avec le calendrier électoral, va dans le bon sens, mais sa mise en œuvre est au mieux une affaire de quelques années ; c’est trop long. Un projet de loi de finances rectificative va passer devant le parlement le 6 septembre, on voudrait suggérer au gouvernement de rajouter 20 ou 30 milliards de réduction des dépenses publiques, ainsi que la suppression de projets hors de prix et économiquement stupides (éoliennes en mer, métro du Grand Paris, 20 milliards d’euros à chaque fois). Les marchés n’ont pas encore pris en compte l’incapacité de la France à vraiment réduire son déficit budgétaire, il vaudrait mieux les prendre de vitesse plutôt que d’attendre la tempête.

Je passerai dans l’émission « Le journal des lycéens » de Hugues Sérapion samedi 6 août de 12h à 13h30 (rediffusion le même jour de 16h à 17h30) sur Radio courtoisie (95.6)

Philippe Herlin
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