En septembre dernier, Mario Draghi avait annoncé son plan OMT (Outright Monetary Transactions) : il prenait la suite du plan SMP consistant à acheter de la dette souveraine de pays en difficulté, de façon à limiter la hausse des taux et à leur permettre de se refinancer. Comme cela ne plait pas du tout aux Allemands (et ils ont bien raison, c’est de la planche à billets), le dispositif OMT est assorti de conditions drastiques puisque le pays qui souhaite en bénéficier doit auparavant demander l’aide de l’Europe et accepter un sévère plan d’assainissement des comptes public imposé par la désormais célèbre "Troïka" (La Tribune).
Résultat personne ne l’a encore demandé. Pourtant la détente sur les taux des pays européens en difficulté s’est prolongée, en apparence les choses s’améliorent. La simple annonce du plan OMT aurait suffi à rassurer les marchés, "bravo Mario" commentent les médias.
La réalité est plus subtile, et perverse : la BCE prête sans limite aux banques du pays pour qu’elles rachètent la dette de leur Etat, ce qui au fond revient au même ! Mario Draghi l’a confirmé hier lors de sa conférence de presse, les banques pourront obtenir les liquidités qu'elles souhaitent au taux directeur, qui a été abaissé de 0,75% à 0,50% (La Tribune). Et la BCE prête de l’argent y compris aux banques au bord de la faillite comme les banques slovènes, qui peuvent ensuite acheter la dette émise par Ljubljana. "Les analystes d'Aurel ETC Pollak rappellent ainsi que ce sont les banques slovènes elles-mêmes qui, le 17 avril, ont racheté le 1,1 milliard d'euros de dette émise ce jour-là, grâce au financement de la BCE" (La Tribune). Et le tour est joué. Il en va de même en Espagne, Italie, etc.
C’est de la cavalerie, de la planche à billets, mais formellement la BCE n’achète pas d’obligations d’Etat. Ce faisant la BCE acquiert un volume croissant de créances sur des banques en difficulté, ce qui n’est pas rassurant ! Posons aussi une question : les banques slovènes avaient-elles le choix ? En fait non tant les intérêts des grandes banques et des Etats sont intimement liés, et c’est le cas dans tous les pays européens. A partir de là, financer les Etats ou les banques revient au même pour la BCE. Le reste est juste un problème de communication.
Philippe Herlin