dimanche 5 août 2018

Ma réponse aux articles "Bitcoin sous le prisme monétariste" du site Coinhouse

Le 31 juillet j'ai publié un tweet pour féliciter Coinhouse (ex-La Maison du Bitcoin) de publier des textes sur la théorie monétaire, mais pour déplorer que la série de trois articles intitulés Bitcoin sous le prisme monétariste (cf bas de la page pour les liens vers les deux autres) accumulait les erreurs et les bourdes. Sur Twitter, on m'a demandé de me justifier, ça me semblait pourtant évident... Bref, sur le temps de mes vacances, en période de canicule, j'ai consacré vingt minutes à relever plusieurs perles, mais ce n'est qu'un échantillon.

Premier article :
- la théorie quantitative de la monnaie, c'est cette équation : MV = PT (Avec M = stock de monnaie en circulation, V = vitesse de circulation de la monnaie, P = niveau des prix, T = volume des transactions). Il n'y a pas "d'output économique", il ne faut pas confondre avec le PIB !
- La masse monétaire du bitcoin, aujourd'hui, n'est pas de 21 millions d'unités mais de 17 millions !
- Il ne faut pas confondre nombre de transactions (T) et vitesse de circulation (V)...
- On n'a pas à postuler que telle transaction est "utile" ou qu'elle est un simple transfert (le problème est le même pour les monnaies fiat), on compte le nombre de transactions, point, et ce chiffre se trouve facilement, sur blockchain.info ou ailleurs.
- "la masse monétaire disponible de bitcoin tend vers zéro", une affirmation aussi fausse que grotesque, elle tend vers 21 millions, il ne faut pas confondre masse monétaire et création monétaire !!!

Deuxième article :
- Pourquoi postuler que "l'égalité monétariste" tendrait à diminuer ? Si c'est le cas, cela veut dire que le bitcoin va stagner puis disparaître ! Le reste du texte est incompréhensible, mais il procède d'une mauvaise compréhension de l'égalité MV = PT, comme nous venons de le voir.
- Affirmer que l'or et l'immobilier sont des réserves de valeur en vertu "d'une prophétie auto-réalisatrice" ressort du gag, il faudrait peut-être s'intéresser à leurs caractéristiques intrinsèques, non ?

Troisième article :
- "Le Bitcoin est un bon candidat pour devenir une réserve de valeur car il n’est pas lié directement à la production de biens et de services"... Il ne faut vraiment rien connaitre à l'histoire de la monnaie pour sortir un truc pareil ! Et l'or ? Des origines de l'humanité jusqu'à la fin des accords de Bretton Woods, il constituait à la fois une réserve de valeur et un vecteur d'échange reconnu par tous, il a notamment pu accompagner toute la Révolution industrielle, rien que çà !
- "Seuls les acteurs majeurs (Banques Centrales et Etats) sont capables d’imposer un consensus au niveau global." Donc le rédacteur de l'article est un étatiste, il ne croit pas aux forces du marché ni à l'ingéniosité humaine... Dommage pour lui.
- “Si un État emprunte à un taux inférieur à l’inflation pour investir dans des bitcoins et si le Bitcoin progresse plus vite que le taux du crédit, alors l’emprunt en monnaie fiduciaire est rentable.“ Je conseille à l'auteur d'aller en parler à Bruno Le Maire... Le rôle de l'État n'est pas de jouer en bourse (il pourrait aussi acheter des actions Apple !) mais de réduire son déficit. Et pourquoi ne conseille-t-il pas aux lecteurs d'emprunter, pour bénéficier des taux faibles, afin d'acheter des bitcoins ? Tout ceci est grotesque.

Il aurait fallu comprendre l'équation d'Irving Fisher, insister sur les différences entre les monnaies "fiat" (déconnexion de l'or en 1971, explosion des dettes publiques et privées, réserves fractionnaires des banques commerciales, QE, taux zéro, etc.) et le bitcoin (à l'opposé de tout ceci), distinguer l'école de Chicago de l'école autrichienne, etc., etc., etc.

Que de temps perdu pour écrire ces évidences... Bonnes vacances à tous !

Philippe Herlin