Un enseignement à bien noter concernant la faillite de Dubaï : les agences de notation sont les dernières à réagir, alors que leur métier consiste précisément à anticiper les problèmes de solvabilité! L’émirat de Dubaï ne possède pas de ressources pétrolières contrairement à ses voisins, il parie sur l’immobilier, le tourisme de luxe et la finance, trois secteurs touchés de plein fouet par la crise. Les projets sont en plus extrêmement coûteux, financés à crédit et, allons-y, complètement débiles (une tour de plus de 800 mètres, une île artificielle en forme de palmier !). Et alors ? Rien, les agences ne bougent pas, ne rétrogradent pas, n’émettent pas d’avertissement. Il faut attendre qu’un fonds géré par le gouvernement annonce qu’il ne peut plus faire face à ses échéances, que la panique se diffuse sur les bourses pour que Standard & Poor’s et Moody’s réagissent, merci. C’est comme pour les Subprimes qui étaient notées AAA jusqu’à ce que tout le monde se rende compte que ça ne valait plus grand-chose. Et une remarque hors sujet au passage, qu’on arrête de nous gonfler avec la «finance islamique», soi-disant plus sage et plus raisonnable, parce que là tous les records du délire financier ont été battus.
Il se passera la même chose pour la dette de la France, des Etats-Unis ou d’un autre grand pays. Aucune agence n’osera prendre les devants même si elle a toutes les informations en main, c’est politiquement trop chaud (et, selon une source perso, les agences de notation sont largement noyautées par d’anciens salariés des banques centrales…). Les agences attendront l’incident de paiement pour bouger et seuls ceux qui sont bien informés auront retiré leurs billes avant… Nous ne serons pas dans le schéma du livre de Philippe Jaffré et Philippe Riès (Le jour où la France a fait faillite, Grasset 2006) dans lequel la note de la France était progressivement abaissée, cela viendra par surprise.
L'émirat de Dubaï au bord de la faillite, Le Figaro
Philippe Herlin
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