(reprise du texte publié sur ACDEFI)
Un nouveau seuil symbolique vient d'être franchi : plus de 70 % de la dette de l'Etat (70,6 exactement) est détenue par des « non-résidents », c'est-à-dire des investisseurs étrangers. Rappelons que la dette de l'Etat s'élève à 1249,6 milliards d'euros et qu'elle constitue la plus grande partie de la dette publique (1591,5 milliards au 30 juin selon l'Insee), qui réunit également celle de la sécurité sociale et des collectivités locales. Voici un produit français qui s'exporte très bien ! Un tel succès prouve la confiance des marchés internationaux envers la signature de la France, fort bien, mais il traduit aussi une fragilité inquiétante. En cas de perte de notre fameux « AAA », la meilleure note possible que nous accordent les agences de notation, le mouvement de défiance qui s'en suivrait rendrait vite problématique le financement de l'Etat, la crise de trésorerie menacerait. Autant le gouvernement peut tenter de rassurer les souscripteurs nationaux (les grandes banques et les sociétés d'assurance), autant une banque anglaise, un fonds de pension américain, un fonds souverain du Moyen-Orient ou d'Asie n'hésitera pas à rayer la France de sa liste (d'autant que nombre d'entre eux ont l'obligation statutaire de souscrire des actifs financiers notés AAA). Cet indicateur doit être surveillé, comme le niveau de la dette lui-même. Le Japon, par exemple, est certes bien plus endetté que la France, mais seulement 7 % de sa dette figure dans des portefeuilles internationaux, ce qui lui donne une sécurité de financement bien plus grande. L'épargne française ne suffit plus depuis longtemps à financer l'endettement public et cette tendance s'accentue inexorablement, la part des non-résidents n'était que de 25 % en 1996, elle franchit la barre des 50 % en 2005, pour atteindre donc 70 % aujourd'hui. Problème supplémentaire, l'Agence France Trésor, qui gère la dette de l'Etat, refuse de rendre public le détail par pays de ces 70 %, une cachotterie qui n'est pas faite pour rassurer. Cette fragilité constitue, s'il en était besoin, une raison supplémentaire de lutter contre l'accroissement de la dette publique.
70,6 % de la dette de l'Etat détenue par les non-résidents (cf 2e tableau) dans le bulletin de septembre de l'Agence France Trésor, qui vient de sortir
Chiffre de la dette publique au 30 juin selon l'INSEE
Philippe Herlin
© La dette de la France .fr