La BCE s’expose doublement à la crise irlandaise puisqu’elle offre des prêts à ses banques pour qu’elles continuent à fonctionner (aucune banque commerciale ne veut leur prêter vu la dégradation de leurs comptes) et, dans le même temps, elle rachète des obligations de l’Etat irlandais sur le marché (les banques commerciales veulent s’en débarrasser vu le risque qu’elles représentent). La BCE a ainsi alloué 136 milliards d'euros de prêts spéciaux et 45 milliards de prêts en urgence aux établissements bancaires irlandais (soit 181 milliards au total). Pour les obligations d’Etat on n’en connait pas le montant exact, mais la BCE a reconnu avoir acheté, depuis la crise grecque de mai 2010, pour 72 milliards d’euros d’emprunts grecs, irlandais et portugais. La BCE est donc engagée envers l’Irlande pour au moins 200 milliards d’euros. Et ça l’inquiète bien sûr, car en cas de « restructuration » de la dette (privée et/ou publique), son capital de 5 milliards d’euros (bientôt 10) n’y suffirait pas ! On voit le mouvement : les banques commerciales se débarrassent des emprunts d’Etats en difficulté, refusent de prêter aux banques trop touchées par la crise, et la BCE vient à la rescousse des victimes pour éviter un krach financier (du type Lehman Brothers). C’est le cas pour l’Irlande, la Grèce, le Portugal, pour l’instant. Ce faisant elle récupère des créances dont la valeur réelle s’avère de plus en plus douteuse. La BCE c’est un peu la voiture-balai de la zone euro ! Aux Etats-Unis, la Fed fait la même chose mais elle monétise à tout va (Quantitative Easing II de 600 milliards de dollars), ce qui desserre la contrainte, mais ne fait que reporter le problème dans le temps cependant. Moins laxiste, la BCE subit d’autant plus de contraintes sur son bilan…
Philippe Herlin
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