jeudi 24 février 2011

Les relations incestueuses Etats/banques

Nous en avons déjà parlé dans cette note mais il est utile d’y revenir : le destin des Etats et des banques est de plus en plus inextricablement lié, plus pour le pire que pour le meilleur malheureusement. En cette semaine de résultats trimestriels bancaires, Dexia annonce une baisse significative de ses résultats (et encore ce recul est-il limité grâce à une baisse du « coût du risque », une manip que nous avons déjà dénoncée ici). Mais surtout des rumeurs inquiétantes planent sur elle… Il est vrai qu’elle est « fortement exposée à un choc souverain » et que, malgré cela, elle n’a « rien provisionné sur ce risque souverain » ! Scandale ? Non, tout à fait normal, en conformité avec les nouvelles normes de solvabilité pour les banques et les assurances Bâle 3 et Solvabilité 2. Voici LA grosse magouille qui risque de nous entraîner par le fond : les Etats en déficit chronique (en partie, mais pas seulement, à cause de la crise financière) émettent des montagnes de Bons du Trésor que les banques et les assurances s’empressent d’acheter parce que 1) c’est rentable (elles empruntent à 1 % auprès de la BCE et achètent des Bons qui rapportent 3 % au moins), 2) il n’y a pas besoin de provisionner ces achats (c'est-à-dire de « geler » des liquidités, ce qui est coûteux). Les Etats et les banques s‘entendant à Bâle pour que ce système « gagnant-gagnant » (qui n'est rien d'autre qu'une bulle) perdure. Au contraire, une saine perception des risques devrait conduire les banquiers à provisionner ces Bons d’Etats à un niveau élevé, ce qui les rendraient moins intéressants (mais pour cela il faudrait un petit truc qui s'appelle la conscience professionnelle). Pendant ce temps les banques ne se fatiguent pas trop à relancer le crédit, ce qui est pourtant leur métier de base. Un système « gagnant-gagnant » qui peut devenir « perdant-perdant » si les Etats ne peuvent plus faire face à leurs échéances et se retrouvent en défaut ou contraints de rééchelonner, car à ce moment les bilans bancaires imploseraient, et tout le système économique avec.

Philippe Herlin
© La dette de la France .fr